1764-05-25, de Voltaire [François Marie Arouet] à Philibert Charles Marie Varenne de Fénille.

Ma fluxion sur les yeux monsieur qui m'a privé neuf mois de la vue, et une extinction de voix qui m'empêche de dicter ne peuvent rien contre les remerciments que je vous dois.
Vous faites des vers comme j'aime qu'on en fasse. Votre Idoménée est à celuy de Crebillon ce que Cinna est à Pertharite. Si je pouvais écrire longtemps je ne finirais pas sur votre mérite, sur vos talents, sur l'amitié que vous me témoignez et gui m'est bien chère. Tous les gens de lettres doivent être unis. Il n'y a que les Frérons qui sèment la zizanie dans le champ d'Apollon. Je prie monsieur de Varenne de vouloir bien que cette lettre soit pour vous deux. J'écris avec une peine extrême. Partagez tous deux mes sentiments. Il fait de jolis vers comme vous en faittes de beaux. Vous êtes amis, pardonez moy tout deux de ne vous pas dire le quart de ce que je voudrais vous dire, et comptez l'un et l'autre sur la parfaitte estime de v. t. h. ob. str

V.