1763-11-17, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mes divins anges, vous devez avoir reçu un petit livre intitulé La Tolérance, lequel j'ai grande envie que vous tolériez.
Je viens d'en envoier un autre à Monsieur le Duc de Praslin, non pas à lui directement, mais à vous sous son envelope, et à vous sans cachet; et je vous dis dans un petit billet, engagez Mr le Duc de Praslin à lire cet ouvrage s'il en a le temps. Il est à la vérité prodigieusement théologique, mais il est honnête; et il y a des choses qu'un ministre doit lire. Tandis que vous étiez à Fontainebleau je n'en sçavais rien, et j'envoiais toujours mes paquets sous le nom de mr De Courteilles. Il y en avait un pour mr D'Amilaville qui m'inquiète beaucoup; il contenait un mémoire pour Mr Mariette; il s'agissait de ma dixme. La chose presse, attendu que la st Martin est arrivée, et que les prêtres poursuivent au parlement de Dijon.

Vous sçavez que la Lettre de Mr le Duc de Praslin au nom du roi, ne réussira pas auprès de messieurs; ils connaissent peu les Lettres des ministres, il leur faut des Lettres patentes. J'ai toujours prévu que je serais obligé de poursuivre cette affaire Litigieusement au conseil des dépèches, et je compte toujours sur les bontés de Mr le Duc de Praslin dans ce tribunal.

Permettez moi de vous demander des nouvelles de vôtre conspiration. Est-elle en bon train? avez vous bien posté vos assassins? avez vous fait joüer vos ressorts? avez vous mis le feu aux poudres? y a t-il quelque chose de nouveau dans le tripot?

Respect et tendresse.

V.