1763-06-10, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jeanne Grâce Bosc Du Bouchet, comtesse d'Argental.

Mes divins anges vous devez avoir reçu des Olimpies et des Zulimes que j'avais fourées dans un paquet adressé à m. le duc de Pralin, pour vous, avec une lettre pour m. le président de Meiniere.
Et malgré l'usage où l'on est à la poste de confisquer tous les imprimez je présume toujours qu'on aura respecté le nom de m. le duc de Pralin et le vôtre.

Je vous ay encor envoyé des Zulimes sous l'envelope de monsieur de Courteilles. On m'a mandé qu'on avait imprimé Olimpie à Paris et qu'on avait supprimé la seule notte pour la quelle je souhaittais que l'ouvrage fût public. Il est bon de connaître les juifs tels qu'ils sont et de voir de quels pères les crétiens descendent. Le fanatisme est bien alerte en France sur tout ce qui peut l'égratigner. Ce monstre craint la raison comme les serpents craignent les cicognes. On est beaucoup plus raisonable dans le petit pays que j'habite. Ah que les Français sont encor loin des Anglais en philosofie et en marine!

J'ay peur de déplaire aux autheurs de la gazette littéraire en les servant. Mais je ne les sers que pour vous plaire.

Je vous prie de vouloir bien faire parvenir l'incluse à frère Damilaville.

Tendresse et respect mes anges.

V.