à Ferney 20 septbr[1762]
Si le désir extrême de revoir Schwessingen pouvait recevoir d'autre motif que celuy de faire ma cour à leurs altesses électorales, je sens que l'envie de voir votre beau téâtre pourait entrer pour quelque chose dans mes idées.
Votre bûcher mon cher intendant du temple, est bien au dessus de mon bûcher mais aussi je n'ay pas un téâtre aussi étendu que le vôtre. Il n'appartient pas au philosophe de Ferney d'avoir le téâtre d'un Electeur. J'ay été obligé de me servir de coulisses parce que la place me manquait. J'ay fait percer ces coulisses à jour. Les flammes qui s'élevaient derrière ces coulisses jetaient des étincelles à travers ces ouvertures. Tout était enflammé, mais ma petite invention n'approche pas de celle dont vous m'envoyez le plan. Présentez je vous prie à son altesse électorale mes Remerciements et mon profond respect.
Je ne doute pas que vous n'ayez donné à l'actrice qui représente Olimpie l'intelligence de son rôle. Elle doit en général dire je vous hais avec la plus douloureuse tendresse, elle doit observer de longs silences, varier ses tons, être pénétrée. Tout doit être animé dans cette pièce, sans quoy la magnificence du spectacle ne servirait qu'à faire remarquer davantage la froideur des acteurs.
J'attends votre précis de l'histoire du palatinat et si je n'ay pas le bonheur de revoir ce beau pays, j'aurai la consolation de le voir dans votre ouvrage.
Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.
V.