1762-07-21, de Voltaire [François Marie Arouet] à Louis René de Caradeuc de La Chalotais.

Je crois, monsieur, que c'est à vos bontés que je dois la réception de votre nouveau chef d'œuvre.
Tous les deux sont d'autant plus forts, qu'ils sont ou paraissent être plus modérés. Les jésuites diront: hœc est œrugo mera. Tous les bons Français vous doivent des remerciements de ces mots: en un mot, des maximes ultramontaines.

Ces deux ouvrages sont la voix de la patrie qui s'explique par l'organe de l'éloquence et de l'érudition. Vous avez jeté des germes qui produiront un jour plus qu'on ne pense. Et quand la France n'aura plus un maître italien qu'il faut payer, elle dira: c'est à monsieur de la Chalotais que nous en sommes redevables.

Vous m'avez donné tant d'enthousiasme, monsieur, que je m'emporte jusque'à prendre la liberté de recommander à votre justice, l'affaire de m. Cathala, négociant de Genève. Il implore le parlement pour être payé d'une dette. C'est un très honnête homme, très exact, incapable de redemander ce qui ne lui est pas dû. Je sais bien qu'en qualité d'huguenot, il sera damné; mais en attendant, il faut qu'il ait son argent en ce monde.

Pardonnez moi, monsieur, la démarche que je fais auprès de vous. Je sais qu'il est très inutile de vous solliciter, mais je n'ai pu m'empêcher de vous dire combien j'estime la probité de mon huguenot. Je ne suis point suspect de favoriser les mécréants, puisque je viens de faire bâtir une église.

Je n'ai point d'expressions pour vous dire avec quel respect j'ai l'honneur d'être &a.