1762-06-11, de Voltaire [François Marie Arouet] à François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence.

Vous avez dû recevoir, Monsieur, un ouvrage fort curieux, et qui peut servir de commentaire à celui que vous lisez actuellement, ou plutôt que vous ne lisez plus.
Car tout admirable qu'est ce livre, il lasse un peu à la fin, et l'uniformité des beautés ennuye.

J'ai ratrapé un peu de santé, et j'en ai grand besoin pour porter le fardeau insuportable des dernières pièces de Corneille. Je ne peux encor vous envoyer celle que nous avons jouée, nous n'avons fait que l'essaier. C'est une pièce prèsque toute de spectacles, et qui éxige une vingtaine d'acteurs. Nôtre Théâtre est si joliment entendu, qu'on y pourait jouer l'opéra.

Voicy une petite Lettre assez curieuse, qui ne grossira pas trop le paquet, et qui poura vous amuser. Il y a une affaire horrible à Toulouse, produite par le plus affreux fanatisme. Vous en entendrez bientôt parler si vous ne la sçavez déjà. Adieu Monsieur, conservez moi des bontés dont je sens tout le prix.

V.