28 novb [1760]
Il se poura faire, Monsieur, que dans quelques jours, une demoiselle de dixhuit ans, viendra se présenter à vous; c'est la petite fille du grand Corneille, la petite nièce de Cinna et de Chimène; il est juste que je prenne quelques soins de la déscendante de mon maître; les vassaux sont obligés de nourrir les filles de leur seigneur.
Supposé qu'elle vienne nous vous demandons, Made Denis et moi, toutes vos bontés pour elle; nous supposons que ce sera vers le temps de L'Escalade; si vers ce temps là, quelque Dame va de Lyon à Genève ne pourait-on pas s'arranger? Je crois que madame D'Argental voudra bien avoir la bonté de se charger de son voyage à Lyon. Celui de Genêve se fera comme vous le jugerez à propos. Vous voyez que nous faisons aller et venir des filles; c'est toujours vous qui favorisez ce beau commerce, et vous devez assurément prendre vôtre droit de passage. Cependant, rien n'est si édiffiant que nos filles, nous les tirons du couvent et nous les renvoions dévottes.
Voicy une petite goute d'eau que je vous endosse. Made Denis vous embrasse de tout son cœur.
J'ajoute que je n'ai aucune nouvelle de ce qui s'est passé depuis le massacre de Torgau, sinon, que je crois bien sçavoir que le maréchal de Daun avait ordre de repasser L'Elbe en cas qu'il y eût une bataille indécise. Le prince Henry est très malade de la poitrine, c'est domage, car il jouait très joliment dans mes pièces; j'attends toujours avec résignation la prise de Pondichery, et la paix dans le séjour de la vie éternelle.
V. t. h. ob. sr
V.