Au château de Ferney 29e Mars 1761
Le pauvre masson de Ferney, Monsieur, travaille à force pour se mettre en état de vous recevoir tant bien que mal, dans sa chaumière, vous et Monsr de la Marche; je ne compte pas trop sur Mr de Pontdevel, lequel ne pense pas qu'il y ait de salut hors de Paris; pour moi, ce n'est pas Paris que j'aime, c'est Dijon; et si je n'étais pas masson, laboureur, barbouilleur de papier, et malade, je quitterais mes atteliers et mon médecin, pour venir jouïr de la société charmante que je trouverais dans vôtre ville.
Vous verrez par la petite Epitre cy jointe, si je suis attaché à la campagne. C'est à vous, Monsieur, que je dois des remerciements de la place dont vôtre académie veut bien m'honorer. Je vous suplie de lui faire agréer mes profonds respects, et ma sincère reconnaissance; ce sera une raison de plus pour m'engager au voyage de Dijon, s'il peut y avoir quelque nouveau motif, après celui de vous embrasser vous et vos amis. J'espère que nous raisonnerons de tout cela au mois d'aoust, dans ma chaumière de Ferney.
J'ai l'honneur d'être avec l'attachement le plus inviolable, Monsieur, vôtre très humble et très obéïssant serviteur.
Voltaire