30 novb [1760]
Je sens bien vivement touttes vos bontez monsieur.
Je vous supplie de ne me pas oublier auprès de Monsieur votre père. Je suis bien flatté de son ressouvenir, et je serai reconnaissant toutte ma vie de son digne et noble procédé. J'aurai à luy écrire dans quelques jours pour une affaire de son ministère, et qui mérite son attention. Il y a presque sous les fenêtres de mon châtau au pays de Gex un marais qui infecte le pays. Le village où ce marais prend naissance est désert; il n'y reste plus qu'un habitant; le reste est mort de la contagion, ou s'est réfugié ailleurs. Les bestiaux qui paissent auprès du marais meurent. La négligence amènera la peste. J'ay présenté des requêtes au conseil, j'ay proposé de dessécher le marais à mes dépends. On a envoyé un commissaire sur les lieux. Rien ne s'est pu faire. J'enverrai à monsieur votre père les certificats des magistrats de la province. Il s'agit du bien public: il faudra bien qu'il s'en mêle et que la chose réussisse. Les faux dévots ne me trouveront ils pas bien impie de vouloir changer le cours de la nature? et de prévenir la peste?
Le solitaire est tendrement attaché au pélerin.
V.