1760-08-06, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

C'est pour vous dire O ange gardien que la chevalerie est lue à l'armée tous les soirs quand on n'a rien à faire, c'est pour vous dire qu'il y en a trente copies à Versailles et à Paris, et que je prétends que M. le duc de Choiseuil répare par ses bontez le tort qu'il m'a fait.

Il n'y a donc pas à ballancer, il n'y a donc pas de temps à perdre. Il faut donc jouer, il faut donc hazarder le siflet sans tarder une minute. Par tous les saints la fin de Tancrede est une claironade terrible. Imaginez donc cette Melpomene désespérée, tendre, furieuse, mourante, se jettant sur son ami, se relevant, envoyant son père au diable, luy demandant expirante dans les convulsions de l'amour et de la fureur. Je le dis ce sera une claironade triomphante.

Vous avez dû recevoir mon gros paquet par M. de Chauvelin.

Au reste je désaprouve fort les tribunaux normands.

Ma foy juge et plaideurs il faudrait tout lier.

Mon divin ange il ne faudrait pas jouer L'écossaise trois fois la semaine. C'est bien assez de sifler deux fois en sept jours l'ami Freron.

Je pris le premier dimanche du mois pour le second dans mon dernier paquet; je datay 10, j'en demande pardon à la cronologie.

Dites moy je vous prie ce qu'on fait de l'abbé Morsles.

Mille tendres respects aux anges.

V.