1760-06-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Le Rond d'Alembert.

Ma cousine Vadé me mande qu'elle a recouvré cet ouvrage moral depuis trois mois, et que notre cousin Vadé étant mort au commencement de 1758, il ne pouvait parler de ce qui se passe en 1760, mais il en parlera par voye de prosopopée.

Je n'ay point vu le mémoire de Pompignan. Tiriot m'abandonne, tirez luy les oreilles.

Mons. Palissot dit que je l'approuve! Qu'on aille chez mr Dargental, il montrera ma lettre, que je luy ay adressée en réponse de la comédie d'Aristophane reliée en maroquin du levant. Je ne puis publier cette lettre sans la permission de mr d'Argental. Elle est naive. Je pleure sur l'abbé Morelet et sur Jerusalem. O mon aimable et ferme et guai et ferme et profond philosophe il faut foutre les dames et les respecter.

Je ne dis pas qu'il faille foutre made du Deffant, mais sachez qu'elle ne m'envoya jamais la lettre dont vous vous plaignez. Elle fit apparemment ses réflexions, vous luy lâchâtes […] apparemment quelque mot qui la fit rentrer en elle même.

N'aurons nous point l'histoire de la persécution contre les philosophes, un résumé des âneries de mtre Joli, un détail des efforts de la cabale, un catalogue des calomnies, le tout avec les preuves? Ce serait là le coup de foudre. Interim ridendum.

Ouy sans doute le seigneur, le ministre dont est question, a protégé Palissot et Fréron, et il me l'a mandé, et il les abandonnait, et il n'est pas homme à persécuter personne, et il pense comme il faut, quoy que pædicaverit cum Freronio in collegio clarimontis et quoy que Palissot soit le fils de son homme d'affaires, mais l'insulte faitte à son amie mourante est le tombeau ouvert pour les frères. Ah pauvres frères! Les premiers fidèles se conduisaient mieux que vous. Patience, ne nous décourageons point. Dieu nous aidera si nous sommes unis et guais. Heraut disait un jour à un des frères, vous ne détruirez pas la rell.. chrét… C'est ce que nous verrons dit l'autre.