à Paris 26 may 1760
Vous m'aviez paru, mon cher confrère, prendre le plus vif intérêt à la persécution que les Philosophes éprouvent; vous m'aviez écrit sur ce ton là, en me priant de vous envoyer ce détail très ennuyeux; vous étiez indigné il y a quinze jours, de ce que les Philosophes se laissoient écraser, égorger, vilipender par des fripons et des fanatiques.
Vous paroissiez vouloir prendre leur défense; Ils l'espéroient, le désiroient; vous m'écrivez aujourd'huy que vous vous en foutez; soyez sûr que je m'en fous encore davantage, et que je m'en fouterai encore plus par la suite.
On dit que Palissot vous a envoyé sa pièce avant qu'elle fût jouée. Il vient d'imprimer une préface où il vous loue à tours de bras, sans doute pour se concilier votre approbation.
Il ajoute dans cette préface qu'il est en commerce de lettres avec vous, & qu'il s'en fait gloire. Mais, comme vous le dites fort bien il faut rire de tout; aussi vous ne me verrez plus que rire.
Je sai que cette vieille putain de Dudeffand vous a écrit, et vous écrit peutêtre encore contre moi & mes amis. Mais il faut rire de tout, & se foutre des vieilles putains, puisqu'elles ne sont bonnes qu'à cela.
Je vous remercie des Pour, qui, quoi, que, quand, quel, &c.; mais il y a des si& des Pourquoi qui valent mieux que tout cela; peutêtre vous les à t'on envoyés?
Il faut que le R. de Pr. ait gâté l'Epitre en vous l'envoyant, corrigée; car assurément elle est meilleure que vous ne dites, au moins dans l'état où je l'ai reçüe; il est vrai qu'il m'a depuis envoyé des variantes qui ne valent pas la première édition, & ce sont apparemment ces variantes que vous avez reçües avant le reste de l'Epître.
A dieu, mon cher confrère le rieur; vous aurez bien de la peine à trouver les hommes plus fous & plus ridicules que moi.