à Tournay 2 aoust 1759
Mon cher correspondant nous ne sommes plus si grands seigneurs que nous étions.
Nous comptions par cinq cent m.lt. Nous voicy réduits à environ 200 m., et grâce à mon frontispice d'ordre ionique, à des pièces d'eau, à des fontaines, à des terres qui coûtent baucoup et rapportent peu, et à plus de soixante personnes à nourrir par jour, attendez vous qu'avant qu'il soit peu nous serons réduits à cinquante mille écus! Mais aussi nous aurons un petit téâtre à Tourney, et vos prêtres viendront s'ils veulent nous voir jouer la comédie que nous jouons mieux qu'eux.
On va donc jouer la pièce de la descente en Albion: je crains toujours pour le dénouement.
A propos vous n'avez donc pas reçu encor les 10000lt la Leu? Vous avez sans doute les lettres de change Montmartel 20 m.lt. Je vois qu'on peut être fort à son aise sans compter par 500 m. Ce n'est qu'un embarras. Que de gens dans le monde, et même parmy les gens de lettres, qui n'ont pas de pareils comptes à faire!
Mille tendres compliments à toutte la famille.
V. t. h. ob. s.
V.
Briasson dit qu'il a envoyé un livre par la diligence.
Remarquez que je ne demande plus de casse.
Le duc de Villars dit que le sucre est bien renchéri. Mais nous allons chercher à Londres celuy des Barbades. Il est excellent.
Voicy la réponse à la lettre que vous m'envoyez de Cadix.
Mr Camp veut il bien permettre que je luy adresse le mémoire cy joint pour son voisin auprès du quel j'implore son crédit?
J'ay reçu et aprouvé Le compte à moy envoyé par Mrs Tronchin et Camp, rendu jusqu'au 1er juillet de la présente année.
Voltaire