1759-01-02, de Voltaire [François Marie Arouet] à Niklaus Friedrich Steiger, baron de Montricher.

Monsieur,

J'apprends par mr de Brenles, que c'est à vous que je dois quelques livres anglais philosophiques, un Bollingbroke, homme disert sans méthode, un Hume qui me paraît plus méthodique, et non moins brave, un Midleton le plus honnête des prêtres, et Shafsburi l'ennemi des prêtres.
Je ne peux trop vous remercier monsieur de la bonté que vous avez eüe de me procurer ce petit receuil d'apôtres de la raison. Ces gens là doivent être vos amis. Voudriez vous bien monsieur ajouter à vos bontez celle de me faire savoire ce que je dois vous rembourser? Je vous le ferai tenir sur le champ par un banquier, mais je ne pourai jamais m'acquiter de l'obligation que je vous ai.

Permettez moy monsieur de profiter de votre bienveillance pour vous demander si je ne pourais point avoir à Berne une copie du traitté d'Aarau fait en 1658 entre votre république et la France. Les droits de mes terres dans le pays de Gex sont en partie fondées sur ce traitté. Il me semble qu'il n'est point dans la collection de Leonard. J'abuse trop de vos bontez. J'espère que cet été je pourai venir vous remercier à Berne, et vous assurer des sentiments de respect et de reconnaissance avec les quels j'ay l'honneur d'être

Monsieur

Votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire gentilhome orde de la chambre du Roy