1758-06-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à Frederick II, king of Prussia.

Sire,

Quoi qu'une lettre d'un vieux suisse ne doive guères être lüe d'un héros qui est dans la Moravie, que votre majesté permette pourtant à l'ancien attachement, au devoir, à la sensibilité, d'oser vous parler de la mort d'un frère.
Vous l'avez rendu immortel par la belle épitre qui est à la tête de l'histoire de Brandebourg, et vous fournissez chaque jour de quoy rendre cette histoire la plus belle et la plus glorieuse de L'Europe. Puisse une heureuse paix terminer tant d'illustres actions, tant de travaux et d'inquiétudes. La douceur de ma retraitte ne m'a jamais laissé fermer les yeux un moment sur ce qui regarde votre personne, votre gloire et votre bonheur. Que votre majesté me permette de luy renouveller dans cette triste occasion des sentiments que je conserverai jusqu'au tombeau.

V.