1756-07-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à Claire Josèphe Hippolyte Léris de Latude.

Il n'y a, mademoiselle, que le plaisir de vous voir et de vous entendre qui puisse me ranimer.
Vous serez ma fontaine de jouvence. J'ai auprès de moi à présent toute ma famille. Je vous l'amènerai. Nous passerons les monts pour vous admirer. Tout ce qu'on me dit de vous me ferait courir au bout du monde pour vous seule. Je vous connaissais déjà les plus grands talents. Vous les avez poussés depuis quelques années à cette perfection à laquelle il est si rare d'arriver. Il n'y a personne qu'on vous compare. Serais je assez heureux encore pour faire quelque chose que vous daignassiez embellir? Il faut que je me hâte, car malheureusement je baisse autant que vous vous élevez; il ne vous faut ni de vieux soupirants ni de vieux poètes. Je ne sais pas encore dans quel temps vous serez à Lyon, mais j'écris à Lyon pour m'en informer dans la crainte que ma réponse ne vous trouve plus à Marseille.

M. le duc de Villars m'a fait l'honneur de me mander qu'il était enchanté de vous. Vraiment je le crois bien. J'espère que m. Tronchin me mettra bientôt en état d'être au nombre de ceux que vous étonnerez à Lyon et à qui vous arracherez des larmes. Comptez que personne ne s'intéresse plus que moi à vos succès, à votre gloire et à votre bonheur. C'est avec ces sentiments que je serai toute ma vie, mademoiselle,

votre &c.