1755-12-06, de Voltaire [François Marie Arouet] à [unknown].

Les imputations calomnieuses sous lesquelles veulent m'accabler des soidisant littérateurs qui sont gens de lettres, comme certains bateleurs sont médecins, les livres qu'ils font imprimer sous mon nom, d'après des manuscrits volés ou défigurés, m'ont forcé d'écrire à l'Académie française.
J'adresse aux compagnies littéraires de province la copie de cette lettre, dans laquelle je cherche à prémunir le public contre leurs méchancetés. Je n'ai pas dû oublier, dans cette occasion, l'académie dont vous êtes le digne secrétaire. J'ai eu le plaisir de vous voir ci-devant, & pour trop peu de temps, à Paris. Je conçus alors autant d'amitié pour votre personne que d'estime pour v. caractère aimable autant que modeste. Après avoir quitté la capitale & un peu trop couru le monde, j'ai trouvé le repos aux bords du lac de Genève. Cette ville renferme des hommes d'esprit, des littérateurs instruits & des magistrats honnêtes qui viennent souvent chez moi & qui ne se fâchent point que je n'aille pas chez eux. Ils me laissent toute ma liberté & tout mon loisir. Ajoutez à ce bien là votre amitié & je serai heureux. Je la mérite par les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être & ca.