[22 March 1753]
…Sans doute que mons. de Maupertuis ne manquera pas si cette infamie qu'on a la méchanceté de vous attribuer parvient à ses oreilles, de mettre toute son innocence en plein jour, & de faire connaître la noirceur de ceux qui osent l'en accuser si injustement.
Jamais il n'aura eu plus beau jeu. Je me flatte monsieur, que reconnaissant par cette calomnie qu'on ne cherche qu'à vous aigrir l'un contre l'autre & à vous nuire, ce sera une occasion favorable de conclure une paix entre vous, qui confonde tous vos envieux.
On m'assure aussi que vous allez exciter une furieuse tempête, contre mon ami la Beaumelle. Je n'en crois rien. Vous aimez trop le repos; & l'état de votre santé vous le rend absolument nécessaire. La Beaumelle a eu tort, j'en conviendrai toujours, de vous attaquer comme il l'a fait, monsieur, je l'en ai grondé bien sérieusement. Vous savez ce qu'il m'a répondu à tous mes reproches. Il est bien éloigné ce me semble de les croire fondés. C'est là ce qui le portera d'autant plus, à ne pas laisser sans réponse, ce que vous écrirez contre lui. Ce n'est pas un ennemi méprisable. Quand il aurait tout le tort du monde, dans ce qu'il pourra vous répliquer, le public ne s'en informera pas & rira à bon compte. Ce sont là des considérations, j'en suis persuadé monsieur, que vous faites beaucoup mieux que moi, & que vous attribuez sans doute à l'estime que j'ai pour vous, & à l'amitié que je dois à la Beaumelle. Je combats suivant toutes les apparences une chimère, je le souhaite du moins. Passez moi mon importunité, en faveur du principe qui m'a mis la main à la plume….