1752-07-25, de Voltaire [François Marie Arouet] à Frederick II, king of Prussia.

Sire,

Vous contâtes hier l'histoire de Gustave Vasa avec une éloquence si animée, que vous nous enchantâtes tous.
J'espère que quand v. m. aura pris le fort Balby, et donné quelque combat paisible, elle s'amusera à mettre en vers ce qu'elle nous dit hier en prose d'une manière si vive et si touchante. En vérité, il y a un homme bien extraordinaire dans le monde:

Il est grand roi tout le matin,
Après dîner grand écrivain,
Tout le jour philosophe humain,
Et le soir convive divin.
C'est un assez joli destin.
Puisse-t-il n'avoir point de fin!

On me presse d'aller à Paris. On veut que j'aille voir jouer cette tragédie que vous aimez, et que vous protégez. Oui! tarare! je ne quitterai point mon grand homme, pour aller chez des gens qui demandent des billets de confession.

Pardon, sire. On ne peut s'empêcher de vous chérir malgré son profond respect.

V.