à Berlin ce 18 de Déc. 1746
Le Marquis de Polmi sera reseu comme Le fils d'un Ministre français que j'estime, et come un Nourison du Parnasse acrédité par Apollon même; Je suis bien fâché de ce que Le Chemein du Duc de Richelieu ne Le Conduise pas par Berlin, il à La réputation de Réunir mieux qu'home de France les talens de L'esprit et de L'érudition au charmes et à L'Ilusion de la politesse, c'est Le modèle le plus avantageux à La Nation française que son Maitre ait pû choisir pour cette Ambasade, un home de tout païs, Citoyein de tout Les Lieux, et qui aura dans tout Les Siècles Les mêmes sufrages que Lui accordent Parïs, la France, et L'Europe entière.
Je suis acoutumé à me passér de bien des agrémens dans la vie, j'en suporterai plus facilement la privation de la bonne Compagnie dont Les gazetes nous avoient anoncé la Venüe.
Tant que vous ne mourréz que par Métaphore je vous laiserai faire, faites vous graisér La phisionomie des st huilles, confeséz vous, resevez à la fois Les 7 sacremens si vous la Vouléz, peu m'importe; cependans dans Votre soit disante agonie je me garderai bien d'avoir autans de sécurité que Les Holandais en ont eu à celle du Maréchal de Saxse: Certes Vous autres Français vous êtes étonans! Vos Héros gagnent des Batailles ayant La Mort sur les lèvres et Vos poètes font des Ouvrages Imortels en s'anéantisant: que ne feréz vous pas si Jamais la Nature se plait par un Caprisse de Vous rendres sains et Robustes?
Les anecdotes sur La vie privée de Louïs 14 m'ont faites bien du plaisir quoi qu'à la Vérité je n'y aÿe pas trouvé des choses Nouvelles. Je Voudrois que Vous n'écrivassiez point La Campagne de 47, et que Vous Metiéz plustôt La Dernière main au Siècle de Louïs 14. Les auteurs Contemporains sont acuséz par tout Les Sciècles d'être tombé dans Les egreurs de la Satire ou dans La fatuité de la flaterie, s'il y a moyein de Vous faire faire un Mauvais ouvrage, c'est en vous obligent à travaillér à celui que Vous avéz entrepris; c'est aux hommes d'aprésent à faire des grandes choses, et à La postérité imparsialle à prononsér sur eux et sur Leurs actions: Croyéz moy achevéz La pucelle, il vaut mieux dérider Le frond des honnêtes gens que de faire des gazete pour des polisons, un Hercule enchené et retenû par trop d'entraves perderait sa force et devienderoit plus flasque que Le Lâche Parïs.
Il semble que Le Daufin ne se Marie que pour exsersér votre génie. Semiramis fait autans de Bruit en Allemagne que La Nouvelle Daufine en fait en France, metéz moi donc en état de jugér ou de L'une ou de L'autre et de joindre Mes sufrages à ceux de tout Versailles.
Maupertuis se remet de Sa Maladie, toute La ville s'intéresse à son sort, c'est notre paladium, et La plus belle Conquête que j'aye faite de ma vie; pour vous qui n'êtes qu'un Inconstant, un Ingrat, un perfide un — que ne vous diroije pas si je ne faisois grâce à Vous et à tout les Français en faveur de Louis 15!
Adieu, Les Vêpres de La Comédie sonnent, Barbarin, Cochoix, Hauteville m'apellent, je vais les admirér, j'aime la perfection dans tout les Métiérs, dans tout les arts, c'est pourquoi je ne saurois refusér mon estime à L'auteur de La Henriade.
Federic