A la Haye, le 28 juin [1743]
Mon héros a-t-il reçu mes lettres de Paris, dans lesquelles je lui mandais que je m'échappais pour lui aller faire ma cour? Je les envoyai à David Gérard, et le dessus était à m. Frédéricshof. Or David Gérard n'est pas sans doute assez imbécile pour ne pas sentir que ce m. Frédéricshof est le plus grand roi que nous ayons, le plus grand homme, celui qui a mon cœur, celui dont la présence me rendrait heureux pendant quelques jours.
J'attends donc à la Haye, chez m. de Podevilz, les ordres de votre humanité, et le forespan de votre majesté.
Que je voie encore une fois le grand Frédéric, et que je ne voie point ce cuistre de Boyer, cet ancien évêque de Mirepoix, qui me plairait beaucoup s'il était plus ancien d'une vingtaine d'années au moins.
Je suis ici chez votre digne et aimable ministre, qui est inconsolable, et qui ne dort ni ne mange parce que les Hollandais veulent à trop bon marché la terre d'un grand roi. Il faut pourtant, sire, s'accoutumer à voir les Hollandais aimer l'argent autant que je vous aime.