à Lausanne ce 1er Mai 1739
Monsieur et très cher Ami,
. . . Je reconnois parfaitement vôtre amitié dans la mention que vous avez bien voulu faire de moi à S. E. Steiguer.
Il m'a toujours fait la grâce de m'honorer de sa bienveillance. De l'application à remplir ses devoirs, est tout ce que ce Seigneur demande pour accorder sa protection. Quoique, après y avoir bien pensé, j'aye conclu qu'il étoit de la prudence de ne rien ajouter à l'histoire de Lauffer, que des Cartes, des sommaires, et la Chronologie, je n'aurois pas refusé des Mémoires, si l'on m'en eut offert de Zurich par ce que je ne laisse pas de faire des notes, mais pour moi même seulement. Ainsi, je ne négligerai point ce qui pourroit les amplifier. Elles se trouveront après moi. On ne m'a rien offert que de Bienne: et c'étoit des Mémoires qui ne regardent que cette Ville. Cependant, je ne les ai pas refusez, et je les dois recevoir dans quelque tems. Mais si Mr de Voltaire est réellement dans le dessein de travailler à l'Histoire de la Suisse, j'abandonnerai ma traduction. Car quand il ne donnerois que deux petits Volumes (Je doute qu'il veuille entreprendre une histoire complette) il feroit tomber toute autre histoire par rapport au débit. Je ruinerai notre Librairie. Pour m'en assurer, j'écrirai à Mr Koenig, dont au reste j'ai vu aussi la belle Lettre il y eut samedi passé huit jours. Il y décrit avec beaucoup d'esprit et de délicatesse la vie délicieuse des philosophes de Cireÿ . . . .
J'ai l'honneur d'être avec tout l'attachement, et toute la considération possibles, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Loÿs de Bochat