1739-04-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Bonaventure Moussinot.

Mon cher abbé je vous prie de joindre à L'envoy que j'attends incessamment, Le troisième tome de mes prétendues œuvres que L'on vend chez Bauche.

A L'égard de l'affaire du chevalier de M. le bon homme qui a quatre mille francs, en a déjà donné deux à mr le marquis de Rennepont, voisin de Cirey. Les deux autres sont tout prêts pour notre cher chevalier et j'en réponds. Je veux absolument luy procurer ce petit plaisir. Je me chargeray de payer au bon homme la rente de 100lt, et le chevalier se chargera seulement de faire ratifier l'emprunt soit par sa mère, soit par sa tante. En un mot il faut absolument qu'une personne ayant un bien libre se charge d'assurer Le payement de ces 2 mille livres, au moins après sa mort. Par exemple la mère ou la tante pouroit servir de caution à son fils ou neveu et hippotéquer ses biens pour L'assurance du payement de ces 2 mille livres après la mort de la mère ou de la tante. Moyennant cet acomodement notre chevalier auroit ses 2000lt franches et quittes; et ils ne seroient payables qu'à la mort de sa mère ou de sa tante. Envoyez ce projet au chevalier, et qu'il voye comment on peut s'arranger avec les loix pour que mon amitié puisse le servir.

Adieu mon cher abbé. Une autre fois je vous parleray de mes petites affaires qui ne sont pas trop bonnes; car personne ne daigne me payer.

Joignez je vous prie à l'envoy une lettre sur le vuide qu'on attribue au père Castel et une suitte du langage des bêtes avec la réponse.

Voicy un petit mot pour mr Darnaud, à qui je vous prie de donner un louis d'or.