1739-04-13, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Ma santé est toujours bien mauvaise quoyqu'en dise madame du Chastelet, mais ce n'est que demy mal puisque la vôtre va mieux.
Madame la marquise vous a demandé Le coup d'état que je crois de Bouzeiz, et l'homme du pape et du roy que je crois du bavard Silhon. Nous attendons aussi Le Demosthene grec, et l'Euclide. Il est triste de quitter ces lectures et Cirey pour des procez et pour les Pays Bas. Je vous demande instament de remercier pour moy Varron Dubos. Je voudrois être à portée de le consulter. Cet homme là a tous les petits événemens présents à l'esprit comme les plus grands. Il faut avoir une mémoire bien vaste et bien exacte pour se souvenir que mr de Charnassé comandoit un régiment français au service des états; la mémoire n'est pas son seul partage, il y a longtemps que je le regarde comme un des écrivains des plus judicieux que la France ait produits.

J'ay écrit à mr Lefranc. Il y a de très belles choses dans son épître, et il paroit qu'il y en a de fort bonnes dans son cœur. Je vous prie de m'envoyer une lettre qui paroit sur L'ouvrage du père Bougeant, et une lettre sur le vide dont vous m'avez déjà parlé.

Mille respects je vous prie à mr Desaleurs et à mr de Crevecœur et à tous ceux qui veulent bien se souvenir de moy.

V.