Je sors, Monsieur, d'avec M. l'abé d'Olivet.
Il vient de nous raconter un trait de vous et de Voltaire, qui vous peint trop bien l'un et l'autre pour que nous ne soyons pas extrêmement curieux de le vérifier. Voici le fait. On dit que vous avez écrit une lettre de civilités a m. de Voltaire, en lui envoyant votre ode, et qu'il n'a répondu à une démarche si généreuse de votre part que par le plus monstrueux des procédés. Je vous prie de nous mander par vous même une nouvelle si intéressante pour tous vos amis, et afin de ne rien refuser à notre curiosité, de vouloir bien nous envoyer une copie de votre lettre à Voltaire, et de sa prétendüe réponse à la vôtre. Je serai charmé enmon particulier d'avoir en main des armes qui vous défendront contre tout ce que vous pouriez avoir encor ici d'adversaires et qui couvriront votre ennemi d'une honte éternelle. Vous étes peut être surpris de n'entendre point parler du p. Brumoy, votre surprise cessera quand vous sçaurez qu'une blessure qu'il s'est faite lui même à la main a pensé lui en faire perdre pour toujours l'usage, et ne lui laisse pas encore la liberté de mander lui même son accident à ses amis. Il m'a chargé de vous en faire part, et de vous accuser la réception de votre paquet. Les exemplaires ont été distribués à leur adresse, il n'y a que celle de m. Gresset que je n'ai pû déterrer. J'ai tant d'empressement de sçavoir le vrai de votre avanture que je me hâte de finir ma lettre, pour la mettre à la poste qui va partir. Je vous embrasse de tout mon cœur et suis avec tout le respect possible, Monsieur
Votre très humble et très obéissant serviteur
Marsy J.
ce 1er aoust 1738
Mille respects à m. le comte, je vous prie.