23 avril [1738]
Je reçois mon cher Tiriot un paquet de notre prince philosofe qui m'en aprend de bonnes.
Mais pourquoy s'il vous plaît n'acompagnez vous pas vos paquets d'un petit mot de votre main? pensez vous que le commerce de l'héritier d'une couronne me soit plus cher que celuy d'un amy?
Madame la marquise du Chastelet a eu chez elle mr et me Dennis. On a été extrêmement content, et je les ay vus partir avec regret. Si vous pouviez trouver un mari dans ce goust là à la Serizi, vous luy rendriez un bon service.
Je cherche àprésent un Strabon, un garçon philosophe, qui puisse m'aider en phisique mente manuque, un petit diminutif de la race des Vocançons. Une bonne maison, de la liberté, de la tranquilité, 4 ou 5 cent livres bien payez par an, et la disposition d'une bibliotèque de phisique complette, et d'un cabinet de mathématiques, feroient son sort. Aureste ce goust pour la phisique n'éteint point celuy de la littérature. Envoyez moy donc ce qu'il y a de nouvau. On me parle d'une ode excellente de Gresset sur L'amour de lapatrie, et d'une épitre du père Brumoy sur la liberté. Peutêtre sont ce de vieilles nouvelles qui arrivent tout usées.
Si vous venez à Cirey j'ay quelque chose pour vous qui vous sera très agréable et très utile.
Vale.
Vous deviez bien accuser au moins la réception de la lettre à Ramau; et nous informer quel usage vous en faites. Recevoir paquets et n'en pas avertir son monde c'est le mettre en inquiétude. Je vous embrasse de tout mon cœur.
V.