1737-01-14, de Gabrielle Émilie Le Tonnelier de Breteuil, marquise Du Châtelet-Lomont à Françoise Paule Huguet de Graffigny.

C'est une consolation pour moi Madame dans l'absence de Mr de Voltaire qu'un commerce aussi agréable que le vôtre, j'espère que v͞s me le continuerés quand j'auray le plaisir de le posséder.
Son voyage en Prusse est bien simple, mais ie ne suis point étonnée qu'on y cherche des motifs malins. J'espère que n͞s le reverrons bientôt. Je v͞s avouë que ie suis très fâchée que votre cour se détruise et surtout que vos aimables philosophes n͞s quittent, j'espérois qu'ils iroient à Comerci et qu'ils se rapprocheroient de n͞s. Les nouvelles disent que Me la duchesse de Loraine va à Turin. Je voudrois qu'elle attendit au mois de juin. J'yrois v͞s voir au mois de may, mais les puissances ne m'ont pas consultée, car j'aurois arrangé les choses tout diférement. Ie seray bien aise dans tout ce dérangement de v͞s conseruer dans notre voisinage. Dites ie v͞s prie mille choses p͞r moi à l'ami du Val, ie veux qu'il se souvienne de moi dans le fond de l'Allemagne, en quelqu'endroit qu'il soit, ie ferai toujours un cas extrême de son souvenir. Mandés moi ie v͞s prie ce que v͞s pensés de toute cette triste destruction. Adieu Madame, je me souviens qu'autrefois v͞s finissiés vos lettres sans façon et que v͞s me permettiés d'en user de même et d'y substituer les assurances de mon amitié.