1736-11-10, de Jean Baptiste de Boyer, marquis d'Argens à Prosper Marchand.

 . . . La lettre que vous m'avés envoié de Bar sur Aube vient de la même main que celle que vous crûtes venir de Paris.
Vous anoncer secrette nouvelle, elle sont toutes les deux de Voltaire. Il a prit pour mois une tendresse incroyable. On n'écrit point plus tendrement. Si je n'étois aussi certain que je le suis combien ce que je vaux est peu de chosse ses louanges me doneroient de la vanité. Il me marque que les letres juives font un bruit de diable en Loraine, en Alsace et Champaigne où il se trouve. Il ajoute qu'on les a contrefaites en Allemagne et que de Strasbourg elle passent en France, mais il ne me dit point dans quelle ville l'on joue ce mauvais tour au sieur Popie. Je vous prie instemment de ne lui pas dire un mot de tout ceci car c'est un jaseur impitoyable et mrs. ses protecteurs en seroient bientôt instruit. Rousseau a fait une épigramme contre mois — il a fait son devoir et n'a point tort. Elle comence ainsi,

Cet gredin plus errant que le juif
Dont il emprunte et le stille et le masque.

Je n'en sçais que cella, c'est Voltaire qui m'a apris cette nouvelle. Il me marque qu'il ne sait pas d'avantage de l'épigramme. On lui a écrit cella de Bruxelles. . . .