1735-10-24, de Pierre Robert Le Cornier de Cideville à Voltaire [François Marie Arouet].
Ta Plume propre à l'Epopée
S'abreuva du sang des Ligueurs,
Dans Le satyrion trempée
Elle exprime d'autres fureurs.
Priape en ses folles caresses
D'un chardon orna ton bonnet
Et L'amour devant toy tenoit
Quelque Venus aux belles fesses.
Ton coeur, impatient du Dieu
Dont Aretin sentit l'empire,
Sur les vers que tu sçu m’écrire
En a distillé tout le feu.
Pour crayonner Manon courbée
Me prestant son Rein amoureux,
Qu'il faut que ton âme absorbée
Ait souvent pasmé dans ces jeux!
Ne rougis point, fils de Latone,
De Peindre ainsy Les amours nus.
Mets ton vernis et c'est Venus
Qui joint un mirte à ta couronne.
L'une et l'autre sans vêtement
En est à mon gré plus gentille,
Pour la pudeur fais seulement
Qu'une grâce les déshabille.
Peins La nüe, et que L'oeil surpris
Voye une immortelle et l'adore,
Mais que le coeur qu'elle dévore
Envie en secret Adonis.
Vous flateriés Venus la Belle
Si voulant rendre ses Beautés,
Dans le bain vous dépeigné celle
Qui préside où vous habités.