Que dirés v͞s quand v͞s receurés vne lettre de moi dattée de Creteil et que dirés v͞s encore quand ie v͞s diray que le deuoir m'a fait faire cinquante lieuës en poste sans me coucher, vn pied chaussé et l'autre nud?
On m'a mandé que ma mère étoit très mal, ie n'ay su autre chose que de laisser tout là et de venir tout courant. Elle est heureusem͞t hors d'affaire. Ie m'en retourneray de même, dès que le 14^e de la maladie sera passé. Le 14^e c'est samedi, ainsi je repars dimanche. Si v͞s m'aimés encore vn peu v͞s me viendriés voir. V͞s conoissés assés ma mère p͞r cela. De plus si v͞s voulés elle ne saura pas que v͞s êtes chés elle. De quelque manière que ce puisse être il faut que ie v͞s voie. Ie vais passer demain vendredi quelques heures à Paris, i'en repartiray à six heures du soir p͞r reuenir icy. Si v͞s voulés m'attendre au caffé de Gradot i'yrai v͞s y prendre entre cinq et six et v͞s reviendrés icy auec moi, ou du moins n͞s ferons le chemin ensemble. Adieu monsieur, v͞s voyés que c'est moi qui viens v͞s voir. Il n'i a pas d'autre party a prendre puis que v͞s ne voulés pas venir à Cirei. Mais que ferés v͞s à Paris? Voilà cette pauure petite Lauraguais morte!

à Creteil ce jeudy [? 15 September 1735]