à Paris ce jeudi au soir et très soir [13 janv. 1735]
Vous m'accusiés de paresse un peu trop vite comme Vous avés vu mon cher ami.
Ma paresse prend fort Bien sur mes affaires mais Beaucoup moins sur mes plaisirs et par conséquent je ne seray jamais paresseux à vous écrire. J'ay grande impatience de voir votre acte nouveau. Je n'ay non plus songé à Didon que s'il n'y avoit point de Virgile au monde. Si Le chant étoit achevé àpeuprès à ma fantaisie je le donerois bien à mr Linant et je croirois Luy faire un fort petit présent; à deux conditions, L'une seroit un secret profond à mon égard et L'autre qu'il le Remanieroit, Retoucheroit, Corrigeroit, et puis il en feroit tout ce qu'il voudroit. Embrassé le pour moy je vous prie. Je ne Réponds à sa lettre que dans celle ci.
On a Repris Sabinus un peu corrigé et il est à ce qu'on dit un peu suporté, ce qui est une grande infamie, mais cela n'ira pas encor à une demi dousaine de Représentations. Il y a un Réveil d'Epimenide qui va à peu près le même train. Je demandai L'autre jour à Dufrene ce qui viendroit après, c'est Le préjugé à La mode de La Chaussée et Marius de Le Franc. Notre ami ne pourroit donc être en datte qu'après ces deux pièces. Il n'y a ici aucunes nouveautés. Je Lis actuellement Les mémoires de mr de Villars ou plutôt sa vie sur ses mémoires. En général ce Livre est fort Bien écrit. Il y a quelques endroits qui ne me plaisent pas. J'ignore L'autheur, on disoit L'abé Houteville mais je mettrois ma main au feu que ce n'est pas Luy.
Emilie est toujours avec mde de Richelieu qui est en Couche et on ne La sauroit attraper. Elle m'a fait dire par plusieurs personnes qu'elle me donera à souper un de ces jours. J'en ay envie pour me mettre au fait des affaires de Voltaire. Je voudrois Ranimer Les négotiations. J'ay Reçu une Lettre de Luy très sensée et je Luy Répondray si je peux sur Le même ton. La vie de mr de Turenne est arêtée tant La fureur de trouver à chicaner est grande. [Mill]e complimens à mr et mde de Frequiene, à Duboutroude, [au ch]evalier et à l'abé de [. . .] . Adieu, en vous embras[sant.]