1731-10-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Baptiste Nicolas Formont.

Le courrier va partir; je n'ai que le temps de vous mander que le Sethos de l'abbé Terrasson prouve que des géomètres peuvent écrire de très méchants livres. On joue les fêtes vénitiennes détestablement. Il n'y a point de comédie. Tout Paris meurt de langueur. Pour moi, je meurs d'impatience de voir Charles 12 à Paris. Je vous supplie donc, mon cher plénipotentiaire, de m'envoyer votre prisonnier. Ce sera à Versailles, chez monsieur le duc de Richelieu, que je logerai. Je vous prie instamment de me faire tenir une lettre d'avis par laquelle je serai autorisé, sous le nom du chevalier, à retirer les ballots appartenant à monsieur le duc de Richelieu. Je me rendrai, suivant la lettre d'avis, soit à St Cloud, soit à Sevres, au jour que vous me marquerez, et j'aurai soin de faire voiturer par terre ce roi malheureux, plus persécuté ici que chez les Turcs.

J'ai envoyé à monsieur Jore l'Essai sur la poésie épique que l'on doit imprimer à la fin de la Henriade. Je vous prie de le lire et de m'en dire votre avis, avant qu'on l'imprime. Je n'ai pas le temps d’écrire à monsieur de Cideville. La poste part, et j’écris ceci dans un café auprès du Bureau des lettres. Adieu; mille tendres remerciements.