28e juillet 1776
Je reçois aujourd'hui, Monseigneur, vôtre Lettre avec Madame De st Julien qui arrive. Je me hâte de vous remercier.
Ce serait une grande consolation pour moi de partir pour venir vous faire ma cour, lorsque Madame De St Julien reviendra à Paris. Le triste état de ma santé est la seule chose qui puisse m'en empêcher. Je ne vois pas qu'il y ait une autre raison, mais celle là en vaut cent autres. La décrépitude est chez moi dans toute la perfection de son horreur. Il ne me reste que ma tendre sensibilité pour vos intérêts, pour votre gloire, pour tout ce qui vous regarde. Je ne me reconnais qu'à la vivacité de ces sentiments. Je volerais à vos pieds si j'éxistais; mais le fait est que je ne vis plus que par mon cœur.
J'espère encor que je verrai ce résumé que vous avez eu la bonté de me promettre. Je le crois nécessaire. Le public a ouvert les yeux. Il me semble que rien ne serait plus convenable qu'un précis de ce que vous avez fait de grand et de mémorable pour ce même public qui est trop souvent ingrât et méchant, mais qui à la longue rend toujours justice. C'est icy une occasion où vous devez souffrir qu'on vous peigne à la postérité tel que vous avez été, et tel que vous êtes. On doit faire vôtre éloge malgré vous même. Je voudrais que cet éloge, fondé uniquement sur les faits, sans phrases d'orateur, et sans la fausse éloquence du barreau fût la principale partie de l'ouvrage, et que le reste ne fût qu'un résumé court et convainquant de L'horrible friponerie que vous avez essuiée.
Je voudrais que ce mémoire fût un monument durable. Je voudrais être bon avocat, et être jeune. Que ne voudrais-je-point! On s'égare en vains désirs jusqu'au moment de sa mort. Je ne m'égare point en vous disant combien je suis pénétré des bontés que vous me témoignez, et à quel point elles redoublent ma passion respectueuse pout vous.
V.