1775-01-25, de Voltaire [François Marie Arouet] à David Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches.

Le moribond de quatrevingt et un ans, est dans son lit, Monsieur, tout comme vous l'avez vu; mais avant de mourir, il vous enverra ce Don Pedre qui est d'un jeune homme, et vous vous en apercevrez bien à son stile qui n'est pas encor formé.

J'ai eu le bonheur de voir au chevet de mon lit Monsieur vôtre fils. Il me parait plus formé que l'auteur de Don Pèdre. Il est très aimable et digne de vous.

Je vous remercie infiniment des deux jeunes gens condamnés à rendre un crucifix de grand chemin pour en avoir brisé un autre; rien n'est plus juste. On y va un peu plus vertement chez les Welches; on inflige la peine des parricides. C'est une autre espèce de justice qui est toute divine, car un crucifix de bois étant Dieu, et Dieu étant notre père, il est clair que celui qui a cassé la tête au crucifix a cassé la tête à son père, donc, le suplice des parricides lui est dû très légitimement. Je mourrai en admirant cette jurisprudence, mais en vous aimant.

V.