1773-04-27, de Joseph Vasselier à Voltaire [François Marie Arouet].
Nourrissez vous de végétaux,
M’écrit un docteur de Marseille;
Mais qu’ils soient tendres et nouveaux.
Ce régime fera merveille
Contre la goutte et tous les maux.
Pour que votre appétit s’éveille
Aux seuls mets que je vous conseille,
Dans mon jardin j’ai fait un choix,
Et je vous offre une corbeille
D’artichauts et de petits pois.

Le courrier m’a effectivement remis hier l’ordonnance et les légumes; permettez moi, monsieur, de les partager avec vous.

Car de cette goutte maudite,
Comme Horace, comme Chaulieu,
Comme Montaigne et Montesquieu,
Vous avez reçu la visite.
Si c’est le lot des beaux esprits
Et des sages de cette sorte,
Ma foi, le diable qui la porte,
En me la donnant s’est mépris,
Et la méprise est un peu forte.
Qu’il s’informe donc à Paris,
A nos modernes érudits:
Des savants il aura l’adresse.
Un tel loge dans ce quartier,
Lui dira monsieur Sabatier,
Avec douceur et politesse;
L’autre demeure en tel endroit.
Si ce docteur marquait sa route,
Le diable serait plus adroit;
Et, sans nul quiproquo, la goutte
Irait toujours à qui de droit.

Elle n’exercerait pas ma patience comme elle fait depuis trois jours; car il est bon de vous dire, monsieur, pour que vous me pardonniez mes mauvais vers, que c’est de mon lit que j’ai l’honneur de vous écrire.