1772-06-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean François René Tabareau.

Je suis, Monsieur, aussi sensible à l’amitié que vous ne cessez de me témoigner, que je suis étonné du procédé de l’homme dont vous avez bien voulu me renvoier la Lettre.
Je lui avais rendu, ce me semble, assez de services à lui et à sa famille, pour qu’il eût pour moi un peu d’égard. Je ne sais pourquoi il vous parle de taxer à Versoy des paquets pour Lyon. Il sait fort bien que ce n’est pas à Versoi qu’on les taxerait et il sait tout aussi bien qu’il n’y a personne d’assez imbécile pour envoier par la poste des paquets qui coûteraient cinq ou [six] louis de port. Il doit présumer surtout, que quand on envoie ces petites caisses à Lyon c’est avec vôtre permission, et qu’il n’a rien à voir, à ce qu’on vous adresse à vous Monsieur, ou à Monsieur Vasselier. Monsieur D’Ogni a reçu plus de cinquante caisses par les mêmes couriers de Versoy; il doit en être parfaittement informé, et celà même devait lui fermer la bouche.

J’écris à Mr D’Ogni, comme vous avez la bonté de me le conseiller. Il favorise ma colonie comme M: Le Duc De Choiseul la favorisait. C’est lui même qui fit passer les premiers envois en Espagne, et je compte absolument sur ses bontés.

Les artistes établis à Ferney ont fait des frais prodigieux qu’ils n’ont point encor retirés et ne sont point en état de faire des présents à la personne qui vous a écrit.

Pour moi, Monsieur, je suis pénétré de reconnaissance envers vous. C’est avec ce sentiment bien véritable et bien tendre que j’ai l’honneur d’être pour le reste de ma vie, Monsieur, Vôtre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire