à Ferney 28e Xbre 1770
Je vois, Monseigneur, par vôtre Lettre à l’académie de Marseille que vous êtes mon protecteur.
Mais j’ai vue par votre silence sur la colonie que j’ai établie que vous ne me protègez point du tout. Je ne peux m’empêcher de vous dire que vous m’avez infiniment affligé. Je n’ai point mérité cette dureté de vôtre part; je m’en plains à vous avec une extrême douleur.
Vous avez cru apparemment que ma colonie n’était qu’une licence poëtique. C’est pourtant une colonie très réelle et très considérable, composée de trois fabriques, protègées par le Roi, et singulièrement par M: le Duc De Choiseul. Elles réussissent toutes. Il n’y a point d’ambassadeur qui ne se soit empressé de nous procurer des correspondances dans les païs étrangers. Vous êtes le seul qui nonseulement n’aiez pas eu cette bonté, mais qui ait dédaigné de répondre. Que vous en coûtait-il de faire dire un mot au consul de France que vous avez à Rome? J’attendais cette grâce de la bienveillance que vous m’aviez témoignée, et de l’ancienne amitié dont vous m’honoriez. Vous faittes descendre canos meos cum mœrore ad inferum.
Je ne devrais pas vous faire des reproches, mais je ne suis pas glorieux. Si vous aviez voulu pour vous ou pour quelqu’un de vos amis quelque jolie montre aussi bonne que celles d’Angleterre, et qui aurait coûté la moitié moins, vous l’auriez eue en dix jours par la poste de Lyon.
Que Vôtre Eminence agrée s’il lui plait, le respect et l’extrême colère de l’hermite de Ferney.
V…