Geneve le 17e de 9bre 1768
Vous avés bien écrit des belles choses, Monsieur, mais il n'en est point de comparable à cette phrase de votre lettre, ‘Quand il s'agit de rendre service, la vie est si courte, qu'il n'y a pas un moment à perdre’.
Je la conserverai comme un monument de la bonté de votre cœur envers le genre humain. Je suis fâché que pour la première fois que vous aurés eu une foy implicite en un Théologien, vous aiés lieu de vous en repentir; mais je ne vous ai trompé, que parce qu'on m'avoit trompé moi même; &, ce qu'il y a de remarquable, je l'avois été par un Philosophe. Ainsi, tout bien compté, nous voilà quitte. Avés vous eu des détails sur l'affaire qui s'est passée en Corse le 2 du Courant? On dit qu'elle a été très vive.
J'ai barbouillé quelque chose sur la Cause Physique des Passions, que je suis tenté d'envoier aux Journalistes Encyclopédiques; vous chargeriés vous de le leur faire parvenir? Ce sujet est très intéressant, & n'a jamais été traitté; je voudrois engager quelque meilleure tête que la mienne à s'en occuper & à en faire part au Public. Il faudroit que l'Education fût bâtie sur un systême, dans le quel ce sujet seroit bien établi & bien développé.
Mr Clavieres, l'Ex-Commissaire, entre, dans ce moment dans ma Chambre; il vous prie de me dire, si vous avés eu la bonté de faire quelque chose, rélativement à ce dont il a eu l'honneur de vous parler? Agréés les assurances de la parfaite considération avec laquelle
j'ai l'honneur d'être
Monsieur
Votre très humble & très Obéissant serviteur
J. Vernes, Pr