1768-10-15, de Paul François de Quélen-Stuer de Caussade, duc de Saint-Mégrin à Voltaire [François Marie Arouet].

Ah qu'il y a loin Monsieur de Ferney à Pompignan! Je viens de traverser Le Village que vous avez rendu fameux, il m'a semblé voir le jeune jésuite en aumusse, Le Beau satin du président, et Le splendide repas de Vingt six couverts; J'ay vu de loin Les murs de la chapelle recrépie.
J'ay cru y lire cette Inscription, Virgini Maria Erexit Pompignan.

A ce style Monsieur Vous reconnoitrez M. David qui veut venger celuy dont il a pris le nom de l'injure que luy a faite Simon Le Franc en rendant ses pseaumes aussy sacrés en françois qu'ils L'étoient déjà en Latin.

Permettez maintenant qu'abandonnant et David et Pompignan je vous parle Un peu de moy et sous mon nom; Permettez que je vous fasse part de la vive impression que vous m'avez faite, et du désir que j'aurois d'aller souvent rendre hommage au seigneur de Ferney. Permettez que je vous prie de me donner quelquefois de vos nouvelles à Paris. Je Le Mérite par l'intérest que je prends à Un homme aussy précieux que vous. Cet Intérest se confond dans moy avec L'amour de L'humanité. Recevez Monsieur l'assurance des sentiments Inviolables avec Lesquels J'ay L'honneur d'être Votre très humble et très obéissant serviteur.

Le Duc de St Megrin

Je vous prie de vouloir bien ne pas montrer ma Lettre. J'ay pour vous en prier Les mêmes raisons que j'avois pour garder l'Incognito chez vous.

M. Dupont qui est accablé de travail, me prie de vous assurer du regret qu'il a de ne pouvoir pas vous parler Luy meme des sentiments dont il est pénétré pour vous.