1766-01-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Et mon dieu! mon ange tutélaire pourquoy ne serait ce pas vous qu'on nommerait médiateur?
Votre ministère parmesan y mettrait il obstacle? Il me semble que non. Ce ministère ne vous empêche pas d'être conseiller d'honneur au parlement et je vous avertis que nos Genevois désirent passionément un magistrat.

Vous verrez par l'imprimé cy joint qui m'est tombé entre les mains, que les perruques de Geneve ne doivent point être ébouriffées de la façon dont on parle des affaires et des miracles de Jean Jacques.

Je sçais que quelques personnes m'ont attribué plusieurs de ces brimborions, mais Dieu mercy on ne me convaincra jamais d'y avoir eu la moindre part. J'en suis aussi innocent que du dictionnaire philosophique qu'on m'a si indignement imputé. Il y a dans Neufchâtel, à Lausane et dans Geneve des gens de beaucoup d'esprit qui se plaisent à écrire sur ces matières. On en avait un très grand besoin. Ces cantons et une grande partie de l'Allemagne étaient plongés dans la plus horrible superstition. On sort àprésent de cette fange, mais croyez moy, il y a encor en France bien des gens embourbez, qui tous couverts d'ordures ne veulent pas qu'on les nettoye. L'opinion gouverne les hommes; et les philosophes font petit à petit changer l'opinion universelle.

Voicy des vers mes divins anges que j'ay faits tout d'une tire sur un sujet qui m'a paru en valoir la peine. Voyez si les vers ne sont pas trop indignes du sujet.

Ah si vous pouviez être plénipotentiaire à Geneve!

Pui-je présenter par vous mes respects à M. le duc de Pralin et à mr le m. de Chauvelin? Je me mets sous vos ailes pr 1766.

V.