Je me hâte de répondre Monsieur à votre lettre du 5 juillet.
Non sans doute le parlement de Toulouse ne peut rien contre l'arrest d'un tribunal suprème nommé par le Roy pour juger en dernier ressort, et jugeant au nom du Roy même. Je crois l'arrest des maitres des requêtes affiché actuellement dans Toulouse par un huissier de la chaine. Toutte la famille Calas doit rentrer dans ses biens, dans son état, dans sa bonne renomée; la mémoire de Jean Calas est réhabilitée; et il ne manque à cette famille que le pardon que les huit juges fanatiques doivent luy demander à genoux, l'argent à la main. Je ne sçais pas ce que fera ce parlement mais je sçais que les loix, le conseil d'état, la France et L'Europe entière le condamnent. On est occupé àprésent à tirer du greffe la sentence qui a condamné les Sirven. Si on y parvient, nous aurons bientôt deux grands monuments du fanatisme de province et de l'équité de Versailles.
L'impératrice de Russie a écrit une lettre charmante pleine de raison et d'esprit au neveu de l'abbé Bazin. On pense dans le nord comme auprès d'Angouleme.
La nièce a pour vous monsieur les mêmes sentiments que moy. Continuez à aimer le bien et à le faire.
Vous savez que ce n'est point à moy d'écrire la lettre que vous voulez bien demander puisque je n'ay point vu la sottise à la quelle vous croyez qu'il faut répondre. On ne peut écrire au hazard. Je ne peux rien ajouter à ce que j'ay eu l'honneur de vous mander sur ce sujet.
Adieu monsieur, permettez moy de vous embrasser très tendrement.
16 juillet [1765]