1764-11-02, de Voltaire [François Marie Arouet] à Étienne Noël Damilaville.

Mon cher frère, comptez que je ne me suis pas allarmé mal à propos sur ce portatif qu'on m'imputait, et qu'il a été nécessaire de prendre à la cour des précautions qui ont coûté beaucoup à ma philosophie.
Le mal vient de ce que des frères zélés m'ont nommé d'abord. Il faudrait que les ouvrages utiles n'apartinsent à personne. On doute encor de l'auteur de l'imitation de Jesu christ. Qu'importe l'auteur d'un livre pourvu qu'il fasse du bien aux bonnes âmes? Je ne sçais pourquoi frère Protagoras ne m'écrit point; je n'en compte pas moins sur son zèle fraternel. Hélas! si les philosophes s'entendaient, ils deviendraient tout doucement les précepteurs du genre humain.

Avez vous entendu parler de la nouvelle édition du testament du cardinal de Richelieu? On croit m'avoir démontré que ce Testament est autentique; mais je me sens de la pâte des hérésiarques, je n'ai jamais été plus ferme dans mon opinion, et vous entendrez bientôt parler de moi; celà vous amusera; je m'en raporterai entièrement à vôtre jugement. Mais surtout, mon cher frère Ecr: L'inf: