1764-06-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mes divins anges, vous devez avoir reçu de la part de l'exjesuite force vers pour les roués.
Ce pauvre diable me dit toujours que la chaleur de la saison et la froideur de la pièce le font trembler. Il se souvient surtout qu'il a oublié de corriger ce vers,

A mon cœur désolé que votre pitié s'ouvre.

Il dit qu'il ne manquera pas de le corriger pour la première poste. Il dit qu'il n'est pas aujourd'hui fort en train.

Seriez vous capables de me dire quel Fargès a opiné pour faire des injonctions aux juges de Toulouse? C'est très noblement opiner, à mon avis. J'ai vu chez moi un Fargès pas plus haut que ma jambe ressemblant assez à m. le coadjuteur. J'ai reçu une lettre anonyme de Toulouse, assez bien raisonnée en apparence, mais le fond de la lettre est que tous les Calas étaient complices, et que les juges n'ont à se reprocher que de ne les avoir pas tous condamnés. Cette lettre ne me donne aucune envie d'avoir un procès à Toulouse.

Je pense toujours que m. de Hullin doit se contenter du paquet qui l'attend chez m. de Laleu, et que les rois titulaires feront gloire d'imiter les rois régnants.

Au reste, je me flatte que mes anges auront aisément trouvé quelque bavard qui parlera de Pierre le cruel à des bavards de sa connaissance. M. de Chauvelin l'ambassadeur est dans le secret comme vous le savez. Je ne crois pas qu'il en parle à la sérénissime république. Je n'ai plus rien à dire.

Respect et tendresse.