1763-04-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à Joseph Marie Balleydier.

Je reçois la lettre de mr Balaidier touchant l'affaire Crassi.
Je luy écrivis hier sur cet objet, et il n'a peutêtre pas encor reçu ma lettre.

J'avancerai tout ce qui sera nécessaire, et mr Balaidier peut en assurer made Crassi, mais il faut que je sois assuré du remboursement. Je ne peux être assuré de ce remboursement qu'en cas que la famille poursuive à Dijon la confirmation de la sentence de Gex. Il faut donc que la mère me donne une procuration pour poursuivre en son nom ou en celuy de ses enfans. Monsieur Arnoud, mon avocat à Dijon, qui est le plus acrédité de la province se chargera de tout et l'afaire sera bientôt finie; si on a une meilleure voye et des moyens plus sûrs on peut me les indiquer. Il est de l'intérest de la famille de ne pas négliger une affaire qui la remet en possession de son patrimoine et il est de sa probité de ne pas me frustrer d'un argent que j'ay prêté avec quelque générosité. L'affaire presse, attendu que les jésuites gèrent leur patrimoine, qu'ils l'ont détérioré, qu'ils ont coupé les arbres, qu'on peut àprésent avoir recours contre eux, et qu'il ne sera plus temps quand le Domaine des jésuites sera remis aux œconomats, comme il le sera sûrement.

Il est d'ailleurs probable que mrs de Crassi rentreront dans leur domaine sans rien payer à mr de Chapeau Rouge attendu que la longue jouissance de l'usure nommée anticrèse, absorbe baucoup au delà du principal prêté aux auteurs de mrs de Crassy.

Ils voyent sans doute combien la poursuitte de cette affaire leur est avantageuse. Je leur ay procuré les moyens de recouvrer leur domaine. Je continuerai. Je ne demande que les sûretez convenables.

Je prie mr Balaidier d'en conférer avec m. Rouph et avec la famille.

Voltaire