[c. 4 February 1763]
J'ai pris la liberté, mon cher frère, d'écrire à m. D'Aguesseau et à m. de Crosne la lettre dont je vous envoie copie.
Je ne sais si mrs de Beaumont, Mariette et Loiseau ne feraient pas bien de présenter requête contre l'insolence du présidial de Montpellier qui a fait saisir leurs factums. Il me semble que c'est outrager à la fois le conseil à qui on les a présentés et les avocats qui les ont faits. Si les avocats n'ont pas le droit de plaider, il n'y aura donc plus ni droit ni loi en France. Je m'imagine que ces trois messieurs ne souffriront pas un tel outrage. Il n'appartient qu'aux juges devant qui l'on plaide de supprimer un factum en le déclarant injurieux et abusif, mais ce n'est pas assurément aux parties à se faire justice elles mêmes. J'espère surtout que cette démarche du présidial de Montpellier, commandée par le parlement de Toulouse, sera une excellente pièce en faveur des Calas. On ne doit plus regarder les juges du Languedoc que comme des criminels qui cherchent à écarter les preuves de leur crime aux yeux de leur province.
Je rouvre ma lettre pour supplier mon frère de faire parvenir mon certificat de vie à m. Delaleu, notaire, car enfin je suis en vie encore, et c'est assurément pour vous aimer.