1761-04-22, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Robert Tronchin.

Le congrez d'Auxbourg mon cher monsieur, n'empêchera point qu'on ne fasse la guerre cette année, ou je suis bien trompé, et les articles de la paix seront dictez par les succez de la campagne, les canons et les bayonettes seront les vrais négociateurs.
J'ay pris la liberté de vous adresser par la messagerie un petit tableau encaissé pour mr Dargental, pui-je encor pousser l'abus que je fais de touttes vos bontez jusqu'à vous prier de faire mettre sur cette petite caisse L'adresse de mr Dargental, et d'ordonner que le port en soit payé à Lyon. Vous me ferez un sensible plaisir, je crois que c'est par la diligence qu'il faut envoyer cette petite caisse.

Vous devez avoir àprésent à Lyon mr de Chimene. Il est entièrement des nôtres, il a acheté une grange, de mauvais prez, de mauvais champs avec une mauvaise vigne qui donne de mauvais vin, à Saconey; et il va faire jouer à Lyon une tragédie de sa façon que nous souhaittons baucoup qu'on ne trouve pas mauvaise. S'il avait pour auditeur Jean Jaques, je crois qu'il serait à plaindre.

A propos de Jean Jacques, j'ay bien grondé le petit Jean Louis Vaniere d'avoir eu l'impertinence de vous adresser un paquet de lettres sur le roman de Roussau. J'espère qu'il ne fera plus de pareille sottise.

On exige le 3e vintieme avec tant de rigueur qu'il faut bien croire que nous serons payez de nos effets royaux.

Madame Denis et melle Corneille vous font mille compliments, bonsoir mon cher ami.

V.