A Paris ce 20 octobre 1760
Je vous avoue, Monsieur, que je ne sçaurois m'empêcher de trouver le parti que prend M. le chancellier bien sévère.
Je ne connois point l'ouvrage; mais M. le duc de Choiseul qui l'a lu avec la plus grande attention, m'a dit qu'il en avoit été extrêmement content et qu'il n'avoit point vû d'ouvrage de M. de Voltaire qui soit écrit avec autant de sagesse. Je dois respecter les motifs que M: le chancellier peut avoir, et je lui ai l'obligation de m'avoir attiré de votre part une marque d'amitié à la quelle je suis très sensible. Comme j'ai très bien compris que vous ne désaprouveriés pas les arrangements qu'on pourroit prendre et qu'il faut autant qu'il est possible faire ses affaires soimême, j'ai envoyé chercher Lemeri. Je lui ai demandé des expédiens. Il n'en connoit point d'autres que de vous demander un ordre qui porte que les balots seront retirés de la douane et remis entre les mains de Saillan pour être renvoyés à l'étranger. Je vous supplie donc Monsieur de m'envoyer cet ordre le plus promptement qu'il sera possible. Je vous le demande avec confiance parce qu'il me semble qu'il ne vous commet en rien et qu'il pourra effectuer la bonne volonté que vous m'avés marqué et dont ma reconnoissance est égale au sincère et respectueux attachement avec le quel j'ai l'honneur d'être, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
D'Argental