1760-09-17, de Voltaire [François Marie Arouet] à Gabriel Cramer.

Je ne crois pas qu'il soit convenable d'imprimer actuellement des Tancrèdes pour Paris.

Comme j'ai fait présent du privilège de L'Edition Parisienne à la Clairon et à Le Kain, leur libraire serait en droit de crier; je pense donc qu'il faut n'en tirer que le nombre d'éxemplaires que Monsieur Cramer peut débiter en Suisse, en Allemagne & dans la province.

Lorsqu'on aura débité le 18e volume on en donnera un dixneuvième au bout de six mois, ce 19e contiendra Tancrède, Fanime et deux autres pièces, avec quelques petits chapitres assez intéressants.

Voilà mon cher ami quelle est ma sage résolution. Vous pourez d'ailleurs réimprimer l'histoire générale quand il vous plaira, en attendant le 2e volume du Czar, qui ne tardera pas à être entre vos mains dès que j'aurai reçu mes instructions. Tant qu'il y aura dans mon corps, je ne sçais quoi, qu'on appelle mon âme, [?battant] dans mon chétif corps, je planterai des arbres, et je ferai rouler la prèsse, et même quand je serai damné, vous aurez de quoi glaner.

Je ne crois point du tout les éxagérations qu'on débite à Genève sur Luc et le cunctateur, j'attends le boiteux.

Gardez vous bien de mettre mon nom au 18e volume et envoyez moy, deux exemplaires des dernières feuilles pour completter les 2 exemplaires que j'ay; plus 3 exemps complets.

Vale.

V.