1759-06-12, de Marie Louise Denis à Louis Gaspard Fabry.

Mon oncle étant malade depuis longtemps, Monsieur, ne peut avoir l'honneur de répondre à vôtre Lettre du 11e.
Il y a très longtemps que nous n'avons été à Ferney; nous savons seulement que les habitans de ce village sont tous en querelle, et qu'ils abusent un peu de la bonté que nous avons eu pour eux. Comme il n'y a nulle ressource dans le paÿs, nous avions fait venir un suisse pour servir en qualité de menuisier; on dit que c'est un bon homme et que sa femme cause quelque jalousie dans le village. Nous avons donné ordre qu'ils sortissent de la maison que nous avions bien voulû leur accorder; aureste, ce n'est pas une affaire que regarde Mr De Tavanes, mais une affaire de police, soumise à la Justice ordinaire, et aux procédures juridiques qu'on aurait dû faire contre les gens dont on se plaint; si l'un de nos gardes chasses et gardes bois ne fait pas son devoir envers nous, il ne sera pas longtemps conservé dans son poste; nous voulons en tout de l'ordre, et ètre servis par ceux que nous payons, et qui ne dépendent que de nous.

Le Roi nous a accordé à mon oncle et à moi la confirmation des droits de L'ancien dénombrement, tant pour la seigneurie de Ferney que pour toutes les terres que nous avons acquises.

Nôtre convention avec M:gr le Comte de la Marche pour ses droits, n'est point encor règlée. Mr le comte d'Argental, envoyé de Parme, qui a bien voulù se charger de cette affaire, n'a pû encor la consommer avec Mr L'abbé d'Espagnac, chef de conseil du Prince, à cause de la multiplicité de ses autres occupations. Celà n'empêche pas, Monsieur, que nous ne soyons très empressez à vous payer ce qui vous revient. Nous vous supplions de vouloir bien avoir égard à la situation présente où nous sommes. Les dépenses ènormes que nous avons été obligez de faire à Tournay, à Fernay et aux Délices, nous ont épuisez. Il s'est fait une banqueroute à Lyon, mon oncle a été obligé de faire cesser tous les ouvrages de Tournay, et nous serons bientôt obligés de suspendre ceux de Ferney. Mais, Monsieur, nous ferons des éfforts pour vous, et dès que la santé de mon oncle lui permettra de sortir, nous irons à Ferney uniquement pour avoir l'honneur de vous voir et de vous donner de l'argent.

J'ai celui d'être particulièrement

Monsieur

Vôtre trés humble et trés obèïssante servante

Denis