1756-03-30, de Voltaire [François Marie Arouet] à Élie Bertrand.

Vous direz, mon cher monsieur, que je suis un étourdi, et vous aurez raison.
J'envoyai cette lettre à m. de Seigneux de Correvon, magistrat de Lauzane. Je mis son adresse au lieu de la vôtre. J'étais si malade que je ne savais pas trop ce que je faisais. M. de Seigneux m'a renvoyé la lettre sans savoir pour qui elle est; je vous rends votre bien, c'est à dire mes hommages et mon cœur, qui sont certainement à vous de droit.

Vous me mandez que me de Gies vous a montré ce dessus de lettre, etc. C'est pur zèle de sa part. Le cachet était surmonté d'une H, on disait à Lauzane que H voulait dire Haller. Mais ce n'est pas le style d'un homme si respectable. On disait qu'il y a d'autres Haller. Tant mieux pour eux s'ils ressemblent un peu à ce grand homme. Mais, que ne dit on pas à Lauzane? Je n'entre point dans les tracasseries. Je ne suis point de la paroisse. Je vis dans la retraite. Je souffre mes maux patiemment. Je reçois de mon mieux ceux qui me font l'honneur de me venir voir. Je vous aime à jamais; et voilà tout.

V.